Christian Beauger (Carnot M.I.N.E.S) : « nous avons l’ambition de développer de nouveaux matériaux catalytiques pour la production d’hydrogène ou la valorisation du CO2 »
Présent lors du salon Hyvolution, le groupe d’experts du Carnot Mines sur l’hydrogène, H2Mines, a fait part des conclusions de son projet de recherche HyTrend. L’occasion de présenter son panel d’expertise scientifique destiné à la filière de l’hydrogène-énergie. Le point avec Christian Beauger, directeur de recherche au Centre PERSEE Mines Paris-PSL et coordinateur de H2Mines.
Pouvez-vous nous présenter l’entité H2Mines ?
Christian Beauger : Créé en 2016, H2Mines est un groupe d’experts en R&D et en formation sur la filière hydrogène de l’institut Carnot Mines. Il regroupe vingt-trois centres de recherche de huit écoles d’ingénieurs et d’Armines : Mines ParisTech, cinq écoles des Mines de l’IMT, l’ENSTA Paris et Clermont Auvergne INP. Couvrant les aspects matériaux/composants, procédés/systèmes et modélisation/simulation, notre expertise concerne l’ensemble de la chaîne de valeur de l’hydrogène : production, stockage, distribution, utilisation d’hydrogène et développement durable. Nos compétences scientifiques sur l’hydrogène permettent d’accompagner les industriels dans le développement de leurs projets d’innovation.
Vous avez publié, en juillet 2024, un livre blanc à destination des industriels. Ce document synthétise les résultats du projet de recherche HyTrend (Hydrogène pour une transition énergétique décarbonée). Quels sont les principaux résultats de ce programme ?
Le projet HyTrend, en trois ans, a permis de mobiliser les compétences de H2Mines autour du développement d’un démonstrateur Power-to-X, Minerve, implanté sur le site de la Chantrerie, près de Nantes Dans le détail, le projet s’est intéressé à trois différents procédés de production d’hydrogène : tri-reformage de biogaz, pyrogazéification de biomasse et électrolyse de l’eau basse température et haute température réversible. C’est sur cette technologie d’électrolyse et sa synergie avec les réseaux électricité/gaz qu’a opéré H2Mines. Nous avons également travaillé sur la production de méthane par reformage de biomasse ou biométhanation, la détection de gaz, le stockage en cavités saline, le captage de CO2 et quelques aspects transverses, comme l’ACV, les risques, les synergies éco-industrielles ou les enjeux sociétaux. Ce projet nous a permis de structurer notre offre d’expertise scientifique et de consolider notre expertise sur différents aspects, par exemple la production d’hydrogène par électrolyse de l’eau ou reformage de biomasse, au travers du développement de nouveaux matériaux catalytiques prometteurs, la régénération de solvant pour le captage du CO2 ou la mise au point d’une plateforme multicapteurs.
En matière de projets de recherche et innovation, quelles sont les perspectives après la fin de HyTrend ?
Avec Mines Albi et Mines Paris, nous avons l’ambition de développer de nouveaux matériaux catalytiques pour la production d’hydrogène ou la valorisation du CO2, en associant les compétences acquises dans le cadre d’HyTrend sur les catalyseurs subnano, d’une part, et les supports de type aérogels, d’autre part. Les résultats obtenus dans HyTrend ont, pour partie, permis d’être lauréat du PEPR Hydrogène avec le projet MatHylde. Son objectif : développer des assemblages membrane-électrode pour rendre les électrolyseurs basse température plus compétitifs. Le réacteur pilote simulant le stockage en cavité et développé avec l’aide du projet HyTrend permettra, par ailleurs, d’ouvrir de nouvelles perspectives de recherche.
Quels sont les principaux défis technologiques pour la filière hydrogène dans les années à venir ?
Il faut impérativement réduire le coût des électrolyseurs pour la production d’hydrogène bas carbone. Cela passe par la recherche d’alternatives compétitives pour les catalyseurs, comme l’iridium, les couches de transport poreuses ou les interconnecteurs. La filière doit également travailler sur la durée de vie des piles à combustible, mieux comprendre et modéliser les phénomènes de dégradation. Là aussi, des défis matériaux nous attendent, pour les catalyseurs, mais aussi les membranes polymériques, la réglementation risquant de devenir de plus en plus contraignante sur les polymères perfluorés. Enfin, pour que la filière soit compatible avec un déploiement à grande échelle, il faudra qu’elle redouble d’efforts en ce qui concerne le recyclage des métaux rares (platine, iridium).