Jeremy Berthuin (Bpifrance) : « Nous attendons des entreprises qu’elles aient un calendrier d’essais cliniques »

18 mai 2020
Jeremy Berthuin

La banque publique a lancé, fin mars, un appel à projets sur le Covid-19. Centré sur les projets de recherche collaboratifs, l’appel cible les travaux capables d’être rapidement mis en œuvre. Jeremy Berthuin, responsable sectoriel santé au sein de Bpifrance, revient pour nous sur les autres spécificités de cet appel, ainsi que sur les réflexions de la banque en matière de financement de l’innovation dans le domaine de la santé.

Quelles sont les spécificités de cet appel à projets ?

L’appel PSPC Covid-19 s’intègre dans un écosystème d’appel à projets lancés après le début de la crise, avec celui de l’ANR ou de l’AID. La particularité de celui-ci, c’est qu’il reprend les conditions de l’appel PSPC « générique » (projets structurants pour la compétitivité), qui existe depuis plusieurs années. Il s’adresse spécifiquement aux travaux collaboratifs, comprenant au moins un laboratoire de recherche académique et une entreprise.

À qui s’adresse-t-il plus particulièrement ?

L’appel à projets s’adresse à tous les types d’entreprises, de la PME aux grands groupes. Côté laboratoires, nous pouvons attendre des programmes de laboratoires de recherche en santé, comme l’Inserm, ou l’Institut Pasteur. Toutefois, la majorité des acteurs académiques est aujourd’hui constituée de partenaires hospitaliers, comme les CHU. Ils ont un rôle très important à jouer dans ces projets, car ils sont capables de réaliser des essais cliniques.

Avez-vous fait des choix en matière de technologies ciblées ?

Nous voulons soutenir des solutions thérapeutiques, qu’elles soient préventives ou curatives. Ainsi, l’appel peut financer des approches préventives, comme le développement de vaccins, par exemple. Il peut également accompagner des solutions plus curatives, comme des projets de repositionnement de molécules, même certaines encore en développement. Seules les solutions de diagnostics ne sont pas éligibles.

Avez-vous un appel à projets spécifiquement sur ce thème ?

Pour les PME, nous avons également celui du concours i-Nov*, qui s’adresse spécifiquement à elles. Chaque année, le thème de l’appel change. Pour la prochaine vague, nous avions choisi « Santé – Situation d’urgence », avant même que la crise sanitaire commence. Les projets attendus ont donc pour vocation d’apporter des solutions aux services d’urgence et de réanimation. Par ailleurs, nous avions inclus, notamment dans la perspective des jeux Olympiques en France, des projets sur la gestion de crises sanitaires de masse. Les travaux sur les diagnostics du Covid-19 correspondent davantage à cet appel. Nous sommes également ouverts à toutes les innovations, qu’elles soient frugales ou incrémentales. J’ajoute que la deadline était le 12 mai dernier, nous l’avons repoussée au 1er juillet.

Quel niveau de maturité des projets attendez-vous ?

Les niveaux de maturité sont très différents. Sur l’appel PSPC, les projets doivent déjà être développés. Je rappelle que les budgets vont de 4 millions à 50 millions d’euros. Nous attendons également que les entreprises aient un calendrier d’essais cliniques et des éléments attestant du rationnel scientifique, et que les essais cliniques puissent être initiés à court terme.

Est-ce que vous voyez de grandes tendances se dessiner parmi les projets reçus ?

Nous voyons arriver beaucoup de projets qui ciblent le syndrome d’hyperinflammation, chez les patients atteints par des formes sévères de Covid-19. Notamment avec des molécules en repositionnement. Nous ne nous attendions pas à avoir autant de recherches sur ce sujet. Nous avons également plusieurs projets de vaccins.

Comment la crise va-t-elle influencer l’activité de Bpifrance ?

Nous réfléchissons actuellement à de nouveaux appels à projets, notamment à travers une réflexion commune appelée « Demain » qui a été mise en œuvre par Bpifrance. Les maladies infectieuses feront sans doute l’objet de plus d’attentions à l’avenir. C’est notamment le cas de la problématique de la résistance aux antibiotiques. Si ce sont des crises plus ponctuelles, elles pourraient être plus lourdes que le Covid-19 à long terme.

Propos recueillis par Florent Detroy

* Le concours i-Nov s’adresse aux projets innovants monopartenaires, portés par des start-up et PME, et capable de placer l’entreprise en position de leader dans son domaine au niveau mondial.

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