PioniQ développe des batteries quantiques sans métaux critiques

La start-up PioniQ Technologies met au point des matériaux quantiques capables de transporter et de stocker du courant électrique. Ils pourraient se substituer aux matériaux critiques des batteries au lithium de type NMC (nickel, manganèse, cobalt). L’équipe souhaite créer un premier démonstrateur d’ici à 2027.
« Le coût des matières premières utilisées dans les batteries freine le développement de la mobilité électrique », affirme Brigitte Leridon, co-fondatrice de PioniQ Technologies et chercheuse au sein du laboratoire de physique et d’étude des matériaux (CNRS/ESPCI Paris PSL/Sorbonne Université). Les matériaux employés, comme le lithium, nickel ou le cobalt, sont les principaux composants des batteries lithium-ion, notamment de type NMC, qui équipent aujourd’hui la plupart des modèles de voitures électriques. Les tensions liées à leur accès, ainsi que leur disponibilité et les coûts environnementaux et sociaux de leur exploitation, participent toutefois à fragiliser cette filière des batteries dite de troisième génération.
La chercheuse, par ailleurs spécialiste de la supraconductivité, développe, avec PioniQ, une solution de stockage de l’énergie qui pourrait s’imposer un jour comme une alternative aux batteries au lithium. Ce projet s’appuie sur les travaux de la chercheuse en physique quantique. « Je travaillais sur les matériaux quantiques, notamment sur les supraconducteurs. Ces matériaux, qui ne peuvent être décrits que par la physique quantique, sont utilisés pour de multiples applications, comme le calcul ou la spintronique. Je me suis intéressée au fonctionnement des électrons dans ces matériaux, puis j’ai étudié les matériaux solides qui conduisent des ions (les électrolytes solides), et j’ai participé à développer un nouveau domaine d’étude, la ion-tronique », explique Brigitte Leridon.
La chercheuse a découvert, entre autres, les propriétés nouvelles d’un matériau capable de capter des ions électriques. « J’ai découvert une famille d’oxydes de titane, qui se révèlent conducteurs pour des ions. Cette propriété fonctionne même à température ambiante. Ce matériau isolant électronique peut, dans certaines conditions, devenir conducteur, car il peut adopter différentes phases, dont certaines avec une permittivité colossale », poursuit la scientifique. Le matériau devient alors un potentiel remplaçant des électrolytes solides utilisés dans les batteries.
Développer des minibatteries
Brigitte Leridon, en collaboration avec l’équipe de PSL Valorisation, décide de s’associer avec deux autres collègues pour fonder PioniQ Technologies, en 2023. Depuis, une première cellule a été développée dans le laboratoire et l’équipe souhaite concevoir un véritable « stack » de batterie. La start-up travaille aussi sur la modélisation de sa technologie, à travers la mise au point d’un jumeau numérique de sa batterie. Une étape importante pour optimiser les performances de la batterie, qui peut par exemple permettre de mieux anticiper son vieillissement. « Nous échangeons avec des start-up du quantique pour utiliser leurs compétences et simuler le fonctionnement de notre batterie », ajoute Brigitte Leridon.
La start-up souhaite lever des fonds pour mener ses développements. Une première levée en amorçage doit permettre de développer un prototype d’ici à 2027. Côté application, la start-up vise d’abord le marché des microbatteries ou microsupercondensateurs, utilisés notamment dans les capteurs, ou pour l’alimentation de composants électroniques. « Nous développons un premier produit de batterie sans lithium ni nickel, de 100 milliampères/heure », précise Brigitte Leridon. L’équipe discute déjà avec des constructeurs automobiles, pour intégrer des capteurs PioniQ au sein de leurs usines, ainsi qu’avec des acteurs de l’IoT et des montres. « Nous échangeons aussi avec des acteurs du spatial et de l’aéronautique, qui sont très intéressés par notre technologie sans métaux critiques et compacts », confie-t-elle.
Nouvelle génération de batterie à venir
Les premiers dispositifs de PioniQ sont équipés d’une cathode et d’une anode métalliques, les deux pôles à partir desquels transitent les électrons. Mais, à moyen terme, la chercheuse prévoit d’utiliser sa technologie « ion-tronique » pour produire des batteries employant une électrode de Zn. « La technologie de stockage zinc-air ou zinc-oxyde permet de créer des piles avec une anode en zinc. Il n’existe pas encore de batterie avec cette technologie, car elle n’est pas réversible. Cependant, avec nos matériaux, nous pouvons rendre cette technologie réversible », conclut Brigitte Leridon.